« – Tu ne m’as toujours pas dit si c’était interdit d’en parler. – Oui mais… non. – Non ? – Non mais… si. – Décide-toi ! – On peut en parler, mais pas l’afficher. – Donc on la cache ? – Non, mais on ne la montre pas trop et on n’en parle pas trop non plus. – Comment on sait si c’est trop ? demande l’arbre. Philou réfléchit un instant puis dit : – Peut-être que c’est quand on ne voit plus que ça. Au lieu de voir un copain, on voit sa religion. Au lieu de savoir qui il est, on sait en quoi il croit. Mais ce n’est pas ça, connaître quelqu’un ! »
« Un peu plus loin, Laure nous montre comment nous coucher en haut des prairies pour nous laisser rouler jusqu’au bas de la pente. Ça fait comme un toboggan géant. –J’ai les chocottes ! s’écrie Camille. –J’ai le hoquet, se plaint Pauline. –J’ai le tournis, s’amuse Tom. –J’ai le bonheur…, je murmure, en priant pour que ça ne s’arrête jamais, la vitesse, le vent, l’odeur de l’herbe, la terre fraîche, les copains, la belle montagne autour de moi. La liberté.
« Le matin, en entrant en classe, j’agite mes cheveux dans tous les sens en lançant : « Bonjour mes nattes… euh pardon, mes tresses ! » à madame Meunier. (…) À la cantine, je vomis en faux, je bave en vrai, je fume ma fourchette, je broute ma salade, je fais des bulles dans mon verre.
(…) Avec moi, personne ne pleure (à part de rire, personne ne meurt (à part de rire), et il n’y a que les rires que jerends fous. (…)
(…) Moi, mon chagrin, je lui mets un nez rouge et je le bombarde de tartes à la crème ! »
« Le premier jour du CP, en faisant l’appel, la maîtresse a eu les yeux qui lui sortaient de la tête. Elle a respiré un grand coup, a pris son élan et s’est appliquée à prononcer chaque lettre en articulant exagérément : « Ve-lo-de-ji-mi-ere-ts ». Ça faisait débile, et en plus, c’est même pas comme ça qu’on dit ! Puis elle a relevé la tête avec un sourire dégoulinant de fausse gentillesse et m’a sussuré d’un ton mielleux :
-Quel prénom, euh… original. C’est de quelle origine ?
J’ai rougi et chuchoté :
-Polonais.
Nemo s’est retourné et j’ai pensé : « Oh non ! À tous les coups, il va me traiter de « poney » et se mettre à hennir ! »
Extrait : « – Et si on formait une amicale ?
– C’est quoi, une akimale ? demande Alan.
– Une A-MI-CA-LE, je répète patiemment. C’est comme un club, un groupe d’amis qui se retrouvent.
– Mais… s’écrient-ils tous en choeur en me regardant, stupéfaits.
– Mais quoi ?
– Nous, on n’a pas d’amis !!!
– Pas grave, je réponds. On sera une amicale de… de… sans-amis ! »
« -Puisque, ne t’en déplaise, nous sommes dans la même école, tu pourrais au moins me confier ce que tes camarades pensent de moi. Ce Marcel, par exemple, dont tu me rebats les oreilles depuis des années et qui, soit dit en passant, est un garnement très turbulent, que pense-t-il de sa chère maîtresse ? Elle paraît tellement sûre d’elle que je n’ose pas la décevoir. Comment pourrais-je lui avouer que Marcel la déteste ? Alors j’improvise : -Il te trouve très… marrante. -Ah bon ? Pourtant, ça n’a pas l’air de l’amuser, ce que je raconte. -C’est parce qu’il t’écoute attentivement, tellement c’est intéressant. -Le dos tourné en train de faire l’imbécile avec ses copains ? -C’est sa manière de se concentrer. -J’en connais une autre, plus efficace ! C’est de la priver de récréation. Pauvre MarceL… »
– Pour faire partie de mon club, explique-t-il le lendemain à Robin, il faut se calmer. – Mais pourquoi ? On est super calmes, nous, s’écrie Robin en se tortillant. – Pas assez… Pour commencer, il faut apprendre à parler doucement, sans crier. – Jamais ? – Non, jamais. – Même quand on nous embête ? – Même. Et puis il faut parler len-te-ment. – Maispourquoi ? Onperddutempsonpeutpasdiretoutcequonveutdire… – Arrête ! Recommence, en articulant s’il te plaît, le gronde Max sévèrement. – Pas la peine, bougonne Robin. – En enfin, interdiction de dire des gros mots. – Aucun ? – Non ! – Même pas m…. ? – Même pas. – Et c.. ? Et p….. ? Et b….. ? Et n…. ? – Stop ! Plus un seul. On a juste le droit d’utiliser des mots comme « zut », « mince », flûte » ou à la rigueur « diantre ». – Mais c’est nul ! – Nul aussi, si tu veux…
« Quand le vent me souffle dans les cheveux, je voudrais bien le suivre, le laisser m’emporter. Tout le temps je veux le vent. Mais je n’ai pas le droit de voler. »
« – Dis-nous donc où tu pars en vacances. Nulle part !!! Voilà la réponse… Mais il est hors de question que Gigi avoue son infortune devant toute la classe. Plutôt mourir ! Plutôt mentir… Rapidement, ses yeux font le tour de la salle à la recherche d’une idée. Du regard elle survole la carte de l’Europe, les photos de volcans, les frises chronologiques, les hiéroglyphes… s’arrête net, et lâche en bafouillant : – Je… vais… vais… vais… en… Égypte ! »
« Ajouter le sucre… mélanger la farine… couper le chocolat… voilà enfin des mots qui sentent bon, des mots qui ont un sens : du bon sens ! Jacquot suit les lignes avec son doigt et arrive vite au bout de la recette. Il relève les yeux et réalise, ébloui, que pour la première fois de sa vie il a lu un texte en entier, sans douleur, sans ennui, et en comprenant presque tout. « C’est parce que c’est intéressant », se dit-il. Et utile aussi : car il compte bien les faire, ces cookies, il compte bien les manger ! »